De Yazd à Bajgiran (du 20.04.2018 au 28.04.2018 – 1.178 km – 9.223 km cumulés)

20 avril 2018.

Après l’échec cuisant de notre escapade dans le désert, nous avions prévu de partir tôt ce matin et de le traverser en CC, ce fichu désert, jusqu’à Maschad où nous devons retirer nos visas turkmènes. Sauf qu’aujourd’hui, c’est vendredi, donc c’est dimanche comme vous le savez, et donc le gardien du parking n’est pas là et la barrière reste close.

No pasaran !
No pasaran !

Nous sommes pris au piège, livrés à nous-mêmes. Le gardien arrivera finalement vers midi, comme ça cool Raoul, sauf qu’entretemps, la lessive pend sur une corde en travers du parking et je me suis lancé dans la publication d’un article. Je lui explique donc que comme nous étions bloqués ce matin, nous partirons demain vu que ça sera samedi, donc en fait lundi. Mais le camion reste là en plein soleil, ça cogne et la température monte. Il fait chaud mais incroyablement sec, l’humidité relative descend à 10 %, nous partons alors vers l’hôtel Dad, un des rares de la ville à proposer une piscine.

Ils sont à point.
Ils sont à point.
Piscine.
Piscine.

La suite, vous vous en doutez : Catherine patiente dans le lobby avec son joli voile (les piscines ne sont pas mixtes, rien à y reluquer à part des gros moustachus), pendant que les hommes passent du sauna au brumisateur et du jacuzzi à la piscine. Et en plus, ça compte pour une douche !

21 avril 2018.

Cette fois, c’est la bonne, nous quittons Yazd et ses bagdirs, ces fameuses tours du vent qui captent la moindre brise pour rafraîchir les habitations par un astucieux procédé d’échange thermique avec des bassins d’eau. Le désert s’offre à nous. De belles lignes droites d’asphalte qui semblent trancher cet univers hostile et oppressant. Du sable, des cailloux, de la chaleur et des camions. Mais la N68 est également jalonnée de caravansérails en ruines qui remontent à l’époque des routes de la soie alors que des étapes étaient prévues tous les trente kilomètres.

Kharanaq.
Kharanaq.
Kharanaq.
Kharanaq.
Kharanaq.
Kharanaq.

Nous nous arrêtons à Kharanaq, une petite cité dont les plus anciennes bâtisses abandonnées ont plus de mille ans, puis nous repartons pour plusieurs centaines de kilomètres.

Kharanaq.
Kharanaq.
Kharanaq.
Kharanaq.
Kharanaq.
Kharanaq.

Malgré l’écrasante chaleur sèche, mes fils ont été exemplaires tout au long du trajet et ils ont bien mérité quelques instants de détente avec des gamins ravis de repartir avec un doudou pour chacun. Mais la journée n’est pas finie. La maréchaussée, qui a au moins eu l’extrême délicatesse d’arriver au fatidique moment de faire la vaisselle, débarque pour un contrôle plus curieux que sérieux. L’agent veut partir avec nos passeports pour en faire des copies au poste, j’exige de venir avec, pas question de les lui laisser.

C'est l'histoire de Paf le dromadaire ...
C’est l’histoire de Paf le dromadaire …
Deyhuk.
Deyhuk.
Alley, au poste, hein dis !
Alley, au poste, hein dis !

Je crois que ça l’a vexé car il m’a lancé un : « But, I’m the police » désabusé. Je me rends compte au poste que j’ai à faire au number one de la police locale : il utilise la seule voiture disponible et son bureau fait trois fois celui de mon patron. Les copies faites, il me raccompagne à domicile, donc au CC, en me pressant de moultes questions dont il appréhende les réponses avec un long regard dubitatif. Bref, sympa mais relou !

22 avril 2018.

Tout droit.
Tout droit.

Notre vraie traversée du désert, c’est dans la ville de Maschad que nous l’avons connue. Après 470 kilomètres de route en plein cagnard, autant dire que j’étais claqué, mais la police locale, une fois de plus, a décidé que ce n’étais pas assez. Tandis que nous étions déjà au lit, elle nous a délogés de notre parking calme et gardé, à deux cent mètres de l’ambassade turkmène, pour nous escorter jusqu’au parking bruyant et mal fréquenté de la gare des bus, quatre kilomètres plus loin. J’ai eu beau discuter, argumenter, provoquer et même faire semblant de chialer, il n’y a pas eu moyen de négocier. Au fait, avez-vous déjà crié – et même hurlé – sur trois policiers iraniens armés de grosses mitraillettes ? Moi oui. Pas bien, hein ! Mais ça soulage quand on est sur les nerfs. D’ailleurs, Catherine pourra confirmer.

23 avril 2018.

Évidemment, nous avons super mal dormi, il y a même un pey qui est venu toquer à l’aube, comme ça par curiosité. Nous n’avons qu’une envie : se tailler de cette ville. Sauf que si nous sommes venus là, c’est pour les visas turkmènes, donc direction le consulat. Par hasard ou par chance, disons la chance du débutant, Catherine trouve un beau parking d’un hôtel confortable, nous pouvons y stationner le camion. Du coup, nous prenons le petit-déj à l’hôtel avant de déposer nos passeports au consulat. Nous visitons ensuite la maison Malek, belle demeure du 19ième siècle qui abrite le Centre de Création et de Recherche d’Art Traditionnel. Ici de la gravure, là de la broderie, le tout agrémenté d’un jardin qui permet d’oublier quelques instants le trafic infernal et discourtois.

Maison Malek.
Maison Malek.
Maison Malek.
Maison Malek.
Maison Malek.
Maison Malek.

 

... peut servir.
… peut servir.

Les visas sont prêts à midi, nous les recueillons comme de précieux sésames qui nous permettent de poursuivre notre aventure. Puisque nous sommes à Maschad, considérée comme étant une véritable ville sainte, et vu que nous sortons indemnes de chaque traversée de rue, je vais finir par y croire, nous allons visiter le Haram-e Motahare Razavi où repose la dépouille de l’Imam Reza, authentique descendant du Prophète Mahomet. Le site sacré est immense, il couvre quasi un million de mètres carrés, et il faut bien ça pour accueillir les quelques 25 millions de pèlerins qui le visitent chaque année. Nous sommes des petits veinards, car le site n’a été ouvert aux touristes non musulmans que récemment. Par contre, notre visite est très encadrée vu qu’un guide nous accompagne en permanence, et nous ne sommes pas admis dans le sanctuaire. Mais cela reste le signe positif et appréciable d’une ouverture vers les infidèles que nous sommes, nous avons d’ailleurs reçu un accueil chaleureux et des petits cadeaux, même si j’ai bien expliqué que je n’étais affilié à aucune obédience. Nous avons également droit à la visite du musée, bien fourni en pièces diverses, telles que des instruments d’astronomie, des armes et des médailles des derniers J.O. (paralympiques).

Haram-e Motahare Razavi.
Haram-e Motahare Razavi.
Haram-e Motahare Razavi.
Haram-e Motahare Razavi.
Haram-e Motahare Razavi.
Haram-e Motahare Razavi.
... ça pique les yeux !
… ça pique les yeux !

Les kets sont toujours aussi intéressés, courent d’une vitrine à l’autre en posant mille et une questions. Après tout ça, j’ai bien mérité d’aller à la piscine de l’hôtel Khorshid Taban, les kets acceptent de m’y accompagner et de nager quelques longueurs tandis que les hommes du cru papotent dans le jacuzzi. Après un rapide resto, nous retournons au CC pour dormir sur le parking de l’hôtel.

Plouf.
Plouf.

Mais on nous fait gentiment comprendre qu’il n’est pas permis par la réglementation de dormir dans son véhicule, même si c’est un camping-car stationné sur un parking privé. Nous faisons gentiment comprendre que cela n’a posé aucun problème dans tout le pays, sauf dans cette très belle ville et qu’il est vraiment dommage d’accueillir les touristes overlanders de la sorte. Nous n’avons pas la moindre envie de réitérer l’expérience d’hier avec la police, et nous la jouons plus fine : « Où voulez-vous que nous allions à cette heure tardive avec nos petits garçons ?  » et « Qu’en est-il donc cette fameuse hospitalité iranienne ?  » Bref, à l’heure où j’écris ces lignes, nous sommes dans une chambre de l’hôtel, que le manager nous a accordée pour une bouchée de pain.

24 avril 2018.

Et en plus, nous avons droit au petit-déj, la journée commence bien. Nous programmons une longue séance d’école, pour compenser les derniers jours passés à rouler et en prévision de la traversée rapide du Turkménistan. Nous prolongeons notre séjour à l’hôtel, pour flâner un peu, petit resto à midi, partie de foot dans un parc et encore une longue séance d’école. Nous ne manquons pas, comme dessert du soir, la bonne glace nationale, sorte de tranche milanaise sauce iranienne : chocolat, safran et rose.

Petit-déj.
Petit-déj.
Au boulot.
Au boulot.
Dizi.
Dizi.

25 avril 2018.

Bien que nous ne nous soyons privés de rien, il nous reste beaucoup trop de rials pour tous les changer en manat lors du prochain passage de frontière. Je pars donc vers les petits bureaux de change et la première banque sur mon chemin pour convertir le surplus en dollars américains, ça peut toujours servir. Trois heures et sept kilomètres de marche urbaine m’auront été nécessaires pour en venir à bout. Les bureaux de change sont « fermés », celui ouvert ne « peut » pas convertir les rials et les banques ouvertes m’envoient vers les changeurs à la sauvette. Finalement, l’opération s’est faite au taux non officiel, dans une banque, avec un intermédiaire au guichet, et des USD issus de la rue qu’un quidam est venu m’apporter. C’est tristement révélateur du niveau de développement et de stabilité économique et sociale du pays. Je quitte mon dernier interlocuteur en lui disant : « What a pitty for your country ». Après ça, Catherine réussit l’exploit de sortir en rue sans son voile, Madame l’a « oublié ». Attitude fort peu orthodoxe s’il en est … Pour le reste, rien de spécial, nous prolongeons encore notre séjour à l’hôtel, pas de visite, pas de casse-vitesse, pas de nuit bruyante, ou presque.

Encore et encore.
Encore et encore.
#socute
#socute
Glacés.
Glacés.

26 avril 2018.

Voilà, nous nous la sommes bien coulé douce pendant notre séjour à l’hôtel, il est temps pour nous de repartir. La sortie de cette grande ville, la deuxième du pays avec un peu plus de quatre millions d’habitants, est fastidieuse, mais vous connaissez mon truc : je squatte la troisième bande, ce qui m’offre non seulement la protection de la berme centrale, mais aussi un revêtement en meilleur état que celui de la bande des poids lourds. Par contre, ça a le don d’agacer les automobilistes, c’est ma petite vengeance des traversées piétonnes infernales. Nous n’allons cependant pas très loin : l’objectif est un bivouac calme au pied d’une tour astronomique construite il y a huit siècles.

Radkan.
Radkan.
Radkan.
Radkan.

27 avril 2018.

Calme n’existe pas dans ce pays, il faisait tellement silencieux que nous avons parfaitement entendu hurler un clébard toute la nuit, comme s’il hurlait à la mort de ses deux neurones. Nous repartons en traversant le vieux village de Radkan, ce qui nous évite le petit kilomètre de piste cahoteuse d’hier soir, puis nous retrouvons la N22 jusqu’à Quchan où je fais l’appoint de diesel, c’est là que se trouve la dernière station avant le Turkménistan. Après, la route traverse des paysages magnifiques et nous mène au petit village frontalier de Bajgiran où j’échange nos derniers rials contre quelques manats. Nous trouvons une place face au cimetière, pourvu que notre dernière nuit en Iran ne soit pas mortelle.

28 avril 2018.

Loin d’être mortelle, cette dernière nuit fut excellente, la meilleure depuis le début du voyage, comme quoi, tout arrive. Nous arrivons vers 9h au poste iranien, les formalités sont pliées avec le sourire en moins d’une heure, il ne nous reste plus qu’à passer le poste turkmène …

 

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