D’Almaty à Oural (du 24.06.2018 au 5.07.2018 – 2.719 km – 16.338 km cumulés)

24 juin 2018.

2.316 km nous séparent du poste frontière russe de Jaysan que nous pouvons et voulons passer le 5 juillet. Selon la qualité des routes, ça peut aller vite ou pas du tout. Autant commencer par une grosse étape, surtout qu’il n’y a rien à voir de spécial jusqu’à Taraz, à 525 km d’Almaty.

Jusqu'ici, tout va bien.
Jusqu’ici, tout va bien.

Pas si mal, mais il faut avouer que la route était assez bonne et que nous n’avons été arrêtés qu’une seule fois à un contrôle de police. J’ai bien géré l’affaire face aux agents qui avaient de bonnes têtes de champions. J’ai commencé par faire éteindre les cigarettes des officiers dans leur kiekekot, puis par faire comprendre que je ne parle ni kazakh, ni russe, ni anglais, ni même français. Que belge, et il n’y a pas encore cela dans Google Translate. Là, ça commence à rire bêtement : ils ont intégré le fait qu’ils avaient affaire à un vrai champion du monde dont ils ne tireraient rien d’autre que le prénom. Alors, ils nous ont relâchés. Après, les kilomètres se sont enfilés comme les sauterelles sur la calandre.

Beurk.
Beurk.

Le genre de route qui fait comprendre à un Belge que l’horizon ne se limite pas à l’espace compris entre le Zwin et le signal de Botrange, aussi beau soit-il. Arrivés en périphérie de Taraz, nous nous arrêtons pour la nuit sur le parking des mausolées d’Aïcha Bibi et de Babadja-Khatoum, où nous sommes rejoints par le fourgon jaune de Shirley et Mathieu. Les mausolées, petits mais jolis, ont été construit sur ordre du seigneur de Taraz au début du XIIe siècle, afin de recueillir les dépouilles de sa dulcinée Aïcha et de la compagne de cette dernière, Babadja. La nature réelle de la relation entre les deux femmes ne m’est pas apparue très claire, toutes les supputations sont donc autorisées.

Aïcha Bibi.
Aïcha Bibi.
Aïcha Bibi.
Aïcha Bibi.
Aïcha Bibi.
Aïcha Bibi.

25 juin 2018.

La nuit fut calme et fraîche, nous avons un jour d’avance sur le programme, banco voilà une journée de repos. Shirley et Mathieu ont l’extrême amabilité de garder mon épouse toute la matinée en l’écoutant radoter, ce qui me permet quelques moments d’évasion avec mes héritiers : nous faisons un concours de tir à distance avec des Nerfs, puis nous allons déguster une glace sucrée au goût cerise. Les mausolées constituent non seulement un lieu de visite agréable pour les touristes de passage, mais aussi un haut lieu de pèlerinage pour les croyants des environs : nous voyons défiler les bus et minibus toute la journée, et même une limousine de 10 mètres. Bien entendu, la journée de relâche est mise à profit pour une dictée et quelques calculs, ainsi que le carnet de voyage, les kets gardent le bon cap.

Tu montes ?
Tu montes ?

26 juin 2018.

Les violents orages de la nuit ont bien rafraîchi l’atmosphère, mais ce plaisir est de courte durée : après 308 kilomètres, nous avons atteint Turkestan, petite ville qui annonce le début de la steppe kazakhe et les souffles d’air chaud, très chaud. Après avoir essuyé deux refus dans deux hôtels, nous trouvons une place à l’ombre sur le parking de l’Administration du Gouverneur de la province qui finira par venir nous saluer en sortant de sa grosse berline avec chauffeur. Je pars en reconnaissance vers le mausolée de Yasawi tandis que les kets prennent une douche froide, enfin plutôt tiède. Le site du mausolée en cette fin de journée ensoleillée est magnifique, je n’avais pas vu de tel ensemble monumental depuis le Registan de Samarcande.

Turkestan.
Turkestan.
Mausolée Yasawi.
Mausolée Yasawi.

27 juin 2018.

Nuitée bruyante et chaude, très chaude, pourtant le CC était bien à l’ombre toute la nuit. C’est comme ça, il faudra faire avec jusqu’en Russie. Shirley et Mathieu partent dans la matinée, ils nous renseigneront comme des éclaireurs sur l’état des routes, les bivouacs et le passage frontière en Russie où, nous les recroiserons sans doute avec plaisir, ça ne fait aucun doute.

Ecole un jour, école toujours.
Ecole un jour, école toujours.
Yasawi.
Yasawi.

Nous profitons de la relative fraîcheur matinale pour visiter le site du mausolée, construit sur ordre de Tamerlan vers 1390, pour servir de tombeau au premier maître du soufisme turc, Yasawi le poète, qui avait pourtant déjà trépassé deux siècles auparavant. A l’intérieur du mausolée, outre la tombe du Saint, le grand chaudron de deux tonnes et d’une capacité de 3 mètres cube témoigne de la ferveur de son donateur, Tamerlan, qui voulait s’assurer que l’eau bénite ne viendrait pas à manquer. Un peu à l’écart se trouve la mosquée semi-souterraine de Hilvet où le grand sage vécu ses derniers jours.

Semi-souterrain.
Semi-souterrain.
Cool Raoul.
Cool Raoul.

Les prochaines journées s’annoncent torrides, des 37 °C la journée et des nuitées à 24 °C. Rien qu’à y songer, j’ai le cerveau qui se liquéfie, mais il n’y a pas trop le choix, nous avons peut-être compté trop large pour traverser le Kazakhstan. Au moins, nous alternons ainsi les journées de route et de repos.

Remparts.
Remparts.
Yasawi.
Yasawi.
Tam-tam-tatam.
Tam-tam-tatam.
Yasawi.
Yasawi.

28 juin 2018.

Hier c’était repos, donc aujourd’hui, c’est repos aussi. On a payé, on y a droit : direction le petit musée d’histoire, la ruelle médiévale et les remparts qui offrent une bonne vue sur le mausolée et le parc qui l’entoure. Il n’y a pas un pet de vent et il fait super douf, nous passons les heures les plus chaudes dans une cantine climatisée et ressortons en fin de journée pour exploser quelques ballons avec des fléchettes, Valentin fait un petit 7/9 et Alexis n’est pas en reste, le forain n’en revient pas. Les kets ont quelque chose de formidable à ajouter dans leur carnet.

A l'ombre.
A l’ombre.
Oh, t'as vu le carquois ?
Oh, t’as vu le carquois ?
Comme des images.
Comme des images.
#VWONTHEWAY
#VWONTHEWAY
Et paf.
Et paf.

29 juin 2018.

Tant qu’à rouler, autant rouler. 733 km aujourd’hui, nous n’aurions pas cru rallier Aralsk depuis Turkestan d’une seule traite. Il faut reconnaître que l’énorme avantage du moteur qui tourne, c’est l’airco qui va avec. Autant avouer que je n’avais pas la moindre envie de m’arrêter de conduire ! A part quelques animaux : des vaches, des chevaux, des dromadaires, des chameaux, une tortue et quelques chiens, pas tous écrasés sauf la tortue, nous n’avons pas vu grand-chose. Je dois une fois de plus saluer ma copilote qui a encore su se montrer à la hauteur : « Tout droit pendant 101 km », puis « Tout droit pendant 167 km », sans oublier le prometteur « Tout droit jusqu’au bout ». Nous espérions assister de loin au lancement d’une fusée, vu la proximité de la route avec le site russe de Baïkonour, mais le départ programmé aujourd’hui a été retardé d’une semaine.

Dis fusée ...
Dis fusée …

Nous nous contentons donc des rues sableuses d’Aralsk, ce petit port de pêche paisible dont les pêcheurs doivent rouler un bon 40 km pour trouver ce qu’il reste de la mer. Ici s’illustre parfaitement la conséquence des activités sans limite des hommes : les trois bateaux et les deux grues rouillées du port attendent en vain le clapotis des vagues, mais … y’a plus d’eau. Et ce n’est pas le ciel qui s’assombrit et le terrible orage qui éclate qui apporteront la solution, comme l’analyse finement mon épouse, très en verve aujourd’hui : « C’est pas ça qui va la remplir, leur mer d’Aral ».

Aral à sec.
Aral à sec.
On ne risque pas de couler.
On ne risque pas de couler.

30 juin 2018.

Aralsk.
Aralsk.

Le musée des pêcheurs est encore fermé ce matin, tant pis la pêche est fermée aussi de toute façon, nous poursuivons notre route, cap Nord-ouest. Le revêtement, très bon jusqu’ici, se dégrade une cinquantaine de kilomètres avant Karabutak, sans vraiment s’améliorer jusqu’à Khromtau où nous nous arrêtons pour la nuit. Les kets ont été formidables, Valentin a observé le paysage pendant des heures, à l’affût d’animaux sauvages, pendant qu’Alexis enchaînait des Club des Cinq sur la liseuse, ils ont bien mérité un petit tour en bateau sur un plan d’eau … artificiel.

Khromtau.
Khromtau.
Yo no soy marinero.
Yo no soy marinero.
Vive les mariés en limousine.
Vive les mariés en limousine.

1er juillet 2018.

L’endroit est calme, il fait chaud mais pas trop et il y a un grand complexe sportif face à notre bivouac, il n’en faut pas plus pour nous décider à prendre une journée de repos. Petites emplettes, petite promenade et une séance de natation à la piscine municipale, gérée à la russe : vente des tickets à l’heure quarante, accès aux vestiaires communs à moins dix, piscine de l’heure pile à l’heure quarante-cinq et il faut libérer le vestiaire avant l’heure pile, sous peine de commettre un attentat à la pudeur à la femme d’ouvrage. Mais elle en a manifestement vu d’autres, pas très farouche cette brave femme. Et à la piscine : on ne saute pas, on ne s’assied pas et on ne s’accroche pas aux cordes entre les couloirs. A part ça, on peut nager, et ça fait du bien. Sinon, plein de visite à la porte du CC, les locaux ne s’embarrassent pas avec les formules de politesse, nous répétons inlassablement « Ni pou ni maïlle » (je ne comprends pas).

Khromtau.
Khromtau.
14h59.
14h59.

2 juillet 2018.

A part les moustiques, la nuit fut très bonne. J’en ai bien dégommé une quinzaine, mais nous sommes quand même un peu piqués. Surtout Catherine, je m’en rends compte chaque jour un peu plus. Alors aujourd’hui, il fait chaud, super chaud. Mais ça sera pire demain, qui vivra verra. En attendant de voir, petite route jusqu’à Aktobe, grosse ville moins reluisante qu’espérée, nous nous y installons devant le Nice Hostel, histoire d’avoir de bonnes douches et de pouvoir travailler au frais sur le PC. Pour la suite, nous hésitons : soit nous allons à la frontière de Jaysan comme prévu, ce n’est plus qu’à 100 km mais il faut attendre deux jours à cause du visa russe, soit nous poussons du côté kazakh jusqu’à Ouralsk, ce qui fait gagner 500 km du côté russe et donc un jour de route sur les dix dont nous disposons. Le hic, c’est qu’à Ouralsk, il fait encore plus chaud et que la route est bof bof. Mais bon, au moins quand nous sommes sur la route, l’airco tourne. Bref, nous aviserons demain.

3 juillet 2018.

Nuit aussi pourrie qu’elle pouvait être, mais la journée ne sera pas en reste. Seule bonne nouvelle du jour : les Diables Rouges ont gagné leur match face aux Japonais. A mon avis, ce n’est pas le moment d’aller au Japon : il paraît qu’ils ne peuvent plus nous saké. Tant qu’à avoir chaud, autant rouler, nous avons décidé de gagner 500 km en Russie. 41°C à l’ombre sont annoncés pour aujourd’hui, sauf que sur la route, il n’y a pas d’ombre, du coup même avec l’airco à volle gaz, ça monte à 33°C dans la cellule : les kets sont à point après 8h de cuisson à basse température. Plus de la moitié de la route n’est pas trop mauvaise, tandis qu’un peu moins de la moitié n’est pas trop bonne. Pas trop bon non plus, l’état du pare-brise après quelques nuages de sauterelles du des dizaines de kilomètres. Le suc de ces insectes explosés colle aussi à la capucine et attire les guêpes, nous passons plus d’une heure à nettoyer la calandre et l’avant du camion, sur le parking de l’hostel où nous avons élu domicile pour deux nuits.

C'est chouette, hein !
C’est chouette, hein !
Il fallait le laver de toute façon.
Il fallait le laver de toute façon.
Oural(sk).
Oural(sk).

4 juillet 2018.

Journée de repos qui se transforme en journée d’intendance : nettoyage, lessive, blog, change de devises, et toutes ces petites choses que nous ne prendrons pas le temps de réaliser pendant la traversée de la Russie, où nous tenterons de tirer profit des dix jours qui nous ont été octroyés. Entre deux coups de soleil, nous nous promenons dans le parc Kirov où les kets font encore péter quelques ballons. Aujourd’hui en tout cas, il fait bien moins chaud : seulement 34 °C à l’ombre.

Oural(sk).
Oural(sk).
Oural(sk).
Oural(sk).
Un peu piqués.
Un peu piqués.

5 juillet 2018.

Cette dernière nuit au Kazakhstan ne fut pas la meilleure, mais ce n’est pas cela qui nous empêchera d’aller en Russie. Départ matinal pour traverser la ville d’Oural(sk) et rallier le poste frontière assez tôt : il n’y a plus que 1.270 km pour arriver à Moscou !

 

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